Alors que le W12 emblématique de Bentley a récemment pris sa retraite, la marque britannique continue de rafraîchir sa gamme en misant sur des motorisations hybrides rechargeables. Après la présentation du coupé Bentley Continental GT hybride en juin 2024, c'est au tour de la limousine de grand luxe, la Flying Spur, de se plier à l'exercice. Mais cette nouvelle version hybride peut-elle vraiment satisfaire les puristes de la marque, ou trahit-elle l’essence même de la majestueuse limousine ?
Sous le capot, le groupe motopropulseur hybride est issu du
Continental GT. Il combine un
V8 4.0 biturbo de 600 ch, généreusement épaulé par un
moteur électrique de 190 ch. La puissance cumulée atteint ainsi 782 ch, tandis que le couple, véritable goliath, affiche
1000 Nm. Ces chiffres ne manquent pas d’impressionner sur le papier, mais qu’en est-il de l’expérience réelle sur la route ?
Comme on pouvait s’y attendre, la greffe d’une batterie lithium-ion de 25,9 kWh contribue à un embonpoint non négligeable. Il est vrai qu’ajouter 250 kg de batteries n’aide pas à garder la ligne. Mais cette surcharge a un avantage : une autonomie totale impressionnante de 829 km selon le cycle WLTP, dont 76 km peuvent être parcourus en mode purement électrique. De quoi permettre à cette berline imposante de se faufiler en ville sans émettre un seul gramme de CO2, à condition de ne pas vouloir titiller les performances du
V8. Quant à la recharge, Bentley propose un chargeur embarqué de 11 kW, suffisant pour une recharge en plusieurs heures. Toutefois, aucune mention d'une recharge rapide en courant continu, ce qui étonne, surtout lorsque l’on sait que la modeste
VW Golf PHEV, issue du même groupe, permet déjà de
recharger à 50 kW. Avouons-le, c'est une lacune surprenante à ce niveau de gamme.
Sur le plan des performances, Bentley annonce que cette version hybride devrait surpasser la
Flying Spur Speed animée par l’ancien
W12. Toutefois, avec près de 2,5 tonnes à déplacer, même les prouesses des 782 chevaux devront lutter contre la gravité. Pour compenser ce poids conséquent, Bentley a équipé sa limousine d’une panoplie technologique digne des véhicules les plus sportifs : transmission intégrale à répartition variable, roues arrière directrices, différentiel arrière autobloquant, et barres antiroulis actives alimentées par un système 48V. Un cocktail promettant, sur le papier, de maintenir un équilibre entre confort et dynamique, bien que le comportement routier d’un tel mastodonte ne soit jamais exempt d’un certain roulis en virage serré.
Visuellement, la
nouvelle Flying Spur joue la carte de la discrétion. Contrairement au coupé
Continental GT qui a subi un lifting plus radical, la limousine se contente de légères évolutions esthétiques. On remarque quelques retouches sur les boucliers avant et arrière, un cadre de calandre subtilement redessiné, et des jantes au design rafraîchi. Le changement le plus notable se trouve à l’arrière, où un grand "B" stylisé s’invite désormais dans les feux arrière, comme un clin d’œil appuyé à l’héritage de la marque. Cependant, pour les non-initiés, difficile de faire la différence avec la version précédente. Est-ce une qualité ou un défaut ? À vous de juger.
L’intérieur, quant à lui, ne subit pas non plus de révolution.
Bentley reste fidèle à son ADN : matériaux nobles, finitions soignées et technologie de pointe. Les amateurs de surpiqûres en cuir et de placages en bois précieux ne seront pas déçus. Néanmoins, malgré la sobriété des changements visibles, on soupçonne une révision en profondeur des systèmes d’infotainment et de conduite assistée. Bentley préfère toutefois garder le mystère sur ces spécificités pour l’instant, sans doute pour ne pas trop dévoiler avant la présentation officielle.
Cette
nouvelle Flying Spur hybride rechargeable incarne donc une sorte de paradoxe. D’un côté, elle représente l’évolution logique d’une marque qui cherche à s’adapter aux nouvelles contraintes environnementales et aux exigences des clients modernes. De l’autre, elle pourrait bien être perçue comme une trahison par les puristes, attachés à la noblesse mécanique du
W12. Après tout, qui aurait cru un jour que l’icône britannique du luxe adopterait un moteur électrique, même en complément d’un
V8 ? L’ère des gros moteurs atmosphériques est révolue, et avec elle, une certaine idée de l’automobile de prestige.
Cependant, ne nous méprenons pas : cette
Bentley reste fidèle à sa vocation. Elle offre un confort princier, des matériaux d’une qualité inégalée, et des performances qui, malgré le poids des batteries, devraient continuer à éclipser bon nombre de concurrentes. Les amateurs de sensations fortes seront ravis de savoir qu’un 0 à 100 km/h est abattu en moins de 4 secondes, tandis que la vitesse de pointe dépasse aisément les 320 km/h. Une performance qui ne fait aucun compromis, même pour un modèle hybride.