Ferrari cultive son image presque à l’excès, et prendre le volant d’une de ses créations demeure bien souvent un doux rêve pour le commun des mortels, mais également pour une bonne partie des journalistes automobiles. Alors, quand je reçois cet appel me proposant de faire quelques photos d’une 488 Pista Spider et, surtout, quelques heures à la place conducteur, je n’ai pas le moindre temps d’hésitation.
C’est à la société Peter Moss AutoClubSport – spécialisée dans la location de voitures de luxe et l’organisation de « roadshows » – que je dois cet appel qui me précipite dans les transports en commun pour rejoindre notre lieu de rendez-vous. Là, je dois bien avouer une petite déception de découvrir une italienne d’un banal gris anthracite sur lequel viennent s’étendre des bandes noires finalement peu visibles. Je dois bien avouer que cette rareté italienne m’aurait terriblement séduit en jaune, ou même dans un rouge vu et revu chez le constructeur transalpin. Au diable le pessimisme, à cheval (cabré) prêté, on ne regarde pas la bride !
Peu importe la robe, la Ferrari 488 Pista Spider en impose sérieusement. La partie avant est totalement retravaillée dans un seul but d’aérodynamisme : bouclier plus ajouré, lame proéminente, large ouverture sur le capot. Le doute n’est pas permis quant à la vocation de la belle italienne, et l’arrière ne fait pas plus dans la demi-mesure avec un aileron plus imposant et un monumental extracteur d’air, tandis que le profil reçoit de nouvelles jupes latérales et des entrées d’air spécifiques sur les ailes arrière.
Néanmoins, aussi sportive soit-elle, cette Ferrari ne fait pas totalement l’impasse sur le confort en disposant d’un inutile système audio JBL professionnel ainsi que d’un système de climatisation. Les ingénieurs italiens ne sont pas des tortionnaires, tout de même.
Sous le capot, un chef-d’œuvre en 8 cylindres n’attend qu’une pression sur le bouton « Start » pour m’envoyer dans un autre monde, féérique. Ce V8 biturbo de 3,9 litres est entièrement retravaillé et permet d’économiser à lui seul 19 kg grâce à l’usage de titane pour de nombreuses pièces, et d’Inconel pour le collecteur d’échappement (-9,7 kg à lui seul). Ce ne sont pas moins de 720 ch et 770 Nm qui s’éveillent dans une sonorité rauque prometteuse, éveillant tous mes sens dans le même temps. La 488 Pista me fait sentir jusque dans les côtes son envie d’en découdre à la microsollicitation de la pédale de droite que j’ai osé tenter, faisant se raidir toute la voiture, imprimant un sourire enfantin sur mon visage.
Il m’en faut plus, je sélectionne le mode Race qui permet au V8 de s’exprimer au mieux de sa forme et de délivrer les meilleures performances. À peine 2,8 secondes de 0 à 100 km/h et tout juste 8 secondes pour atteindre les 200. Démentiel, comme la vitesse maximale de 340 km/h que je me garderai de tester. Là n’est pas l’essence de ce modèle qui me catapulte de virage en virage avec brutalité, les effaçant les uns après les autres à des vitesses délirantes et me gratifiant de dérobades prévenantes du train arrière lorsque je remets les gaz trop tôt en sortie. Chaque freinage est une claque tant le mordant des carbone-céramique semble sans limites, chaque relance n’est que violence, me laissant extatique, oubliant le monde alentour. La boîte de vitesse à double embrayage participe activement à l’expérience, semblant lire dans les pensées tant elle se trouve systématiquement sur le bon rapport, tant elle est rapide à s’exécuter à la moindre demande.
Contrairement à la poussée sans fin du V8 biturbo au-delà des 8 000 tr/min, mon essai en a une, de fin, douloureuse. C’est une vacuité brute, fragilisante, que je ressens au moment de rendre les clefs. L’impression d’avoir vécu une parenthèse enchantée, thaumaturgique, que jamais plus je ne retrouverai. Mais bon, elle était juste grise tout de même…
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