Pour en savoir un peu plus sur la partie technique de l'Alpine A110, je vous invite à vous rendre ici. |
Il est 9 h du matin lorsque je récupère mon Alpine A110 bleue, forcément bleue. Si le ciel n’est pas menaçant, le spectacle de ses roues posées sur une fine couche de neige l’est. Je me vois déjà revivre les grandes heures de la berlinette au rallye de Monte-Carlo, mais au volant et sans le talent.
Cependant, avant ça, je dois prendre possession de la belle. Car belle, elle l’est. Bien entendu, c’est subjectif, mais elle rappelle tellement la première A110 tout en la mettant totalement au goût du jour. Elle en reprend les 4 phares à l’avant, la nervure sur le capot, les flancs creusés et la ligne de fuite au niveau des épaules tandis que l’arrière propose une assise très basse à l’aspect particulièrement large.
Pourtant, la nouvelle venue offre des dimensions à donner des sueurs froides à mon mètre quatre-vingt-dix-sept avec à peine 1,85 m de large et tout juste 1,25 m de hauteur. Un petit tour par les coffres de 100 litres à l’avant et 96 litres à l’arrière puis je monte à bord. Enfin, je descends plutôt.
Alors, est-ce que ça passe ?
Ici, pas d’immense marchepied à enjamber ni de toit à éviter comme sur une Lotus, l’accès à bord est d’une simplicité enfantine et ne me demande aucune contorsion particulière, j’apprécie. Une fois à bord, bien calé dans mon siège baquet je cherche la bonne position de conduite. Seuls deux réglages s’offrent à moi, la profondeur du siège ainsi que celle du volant. Je peux également régler la hauteur de ce dernier, ce qui n’est pas le cas de mon siège déjà réglé sur la plus basse des trois positions possibles.
Pour répondre à la question, oui ça passe, et même très bien. Outre le fait que le siège soit très bien dessiné, confortable et accueillant, j’ai de la place aux épaules et laisse quelques centimètres entre le haut de mon crâne et le plafond. Le point fort de l’Alpine est que cet intérieur semble s’adapter à tous les gabarits alors même qu’il offre très peu de réglages.
Face à moi, le volant semble avoir été monté dans le mauvais sens, le cuir sur les côtés et la suédine en haut et en bas. Ça me semble totalement illogique, quitte à mettre deux revêtements, autant revêtir du non glissant les parties où l’on pose les mains. Ce n’est pas le seul défaut de la présentation, le premier étant l’écran tactile et son système d’infodivertissement qui n’ont rien à faire dans une voiture à 55 000 €. Ensuite, quelques détails chagrinent comme la commande des rétroviseurs électriques, très cheap et mal placée. Certains pourront se plaindre de plastiques durs dans les parties basses, mais pour ma part ils ne me dérangent pas du tout. À l’inverse, la présence de cuir est valorisante, les touches pianos des commandes sont sympathiques, j’apprécie de trouver une vraie commande physique pour la climatisation et je trouve la poutrelle centrale flottante du plus bel effet en plus d’offrir dessous un espace pour vider ses poches. C’est là que je trouve le gros bouton rouge de mise à feu, sur lequel je m’empresse d’appuyer avant d’enclencher le mode Drive.
Je suis le premier déçu de ne pas avoir un levier de vitesse mécanique sous la main droite et un moteur atmosphérique sous le capot, j’étais même l’un de ceux, cités en introduction, qui dénigraient la boîte de vitesses à double embrayage sans savoir. Mais il faut vivre avec son temps et parfois le changement a du bon.
Rassurante Alpine
Dès le démarrage, le 1,8 l TCe s’ébroue sans esbroufe. Le bruit est sympathique pour ce genre de moteur, une sonorité un peu grave aux notes sportives. Je démarre en douceur et quitte la neige du parking pour trouver un macadam froid et humide qui incite à une prise en main en douceur.
C’est donc tranquillement et en mode Normal que j’entame cet essai tant attendu. La sonorité se fait discrète, l’espace à bord est généreux et le confort de suspension remarquable. Les aspérités de la route sont survolées tandis que les dos-d’âne sont avalés sans nécessiter la moindre attention particulière, ce qui est tout aussi surprenant qu’agréable pour une voiture aussi basse. La boîte de vitesses égrène les rapports dans un sens ou dans l’autre avec douceur et toujours à bon escient et le rythme s’élève naturellement au fur et à mesure, autant que la densité de virage sur ma route. J’enclenche donc le mode sport.
Le volant, jusque-là peu consistant et communicatif, se raffermit à peine. Petite déception rapidement gommée par le moteur plus sonore et la boîte plus réactive. Le premier ne tombe toujours pas dans la caricature tandis que la seconde termine d’effacer mes dernières craintes à son sujet tant elle est bien étagée, précise et répondant immédiatement ou presque à la moindre de mes sollicitations via les palettes au volant. Elle est à peine moins bonne que l’excellente PDK de la Porsche Cayman (lire notre essai). Le moteur se montre légèrement creux sous 2 500 tr/min, mais grâce au poids très contenu c’est finalement peu sensible. Par contre, ensuite il ne rechigne jamais à l’effort et semble toujours en redemander jusqu’à près de 7 000 tr/min.
Pendant que le moteur séduit, la tenue de route amuse
C’est réellement le terme adéquat, la tenue de route est particulièrement amusante. Autant qu’elle est saine, légère, agile, facile et équilibrée. L’Alpine A110 me surprend très rapidement, non pas en me poussant à la faute, mais en me donnant l’impression d’être équipée d’un système à quatre roues directrices. C’est la magie des suspensions à double triangle à l’avant et à l’arrière qui opère, donnant l’impression de virer à plat avec une agilité déconcertante. La direction, bien qu’inconsistante, est à la fois précise et assez directe. Je place donc le train avant parfaitement guidé en entrée de virage avant de relancer et de sentir le train arrière me pousser. Mais le mode sport n’est en aucun cas permissif sur les dérives et l’ESC veille au grain.
Ce dernier est néanmoins soit totalement déconnectable via un bouton piano, soit plus permissif en mode Track, permettant un angle de dérive d’environ 25°. Bien que l’A110 se soit montrée particulièrement saine même sur les parties grasses, je me contente d’enclencher le mode Track. La petite Alpine démontre ici toute sa réussite. La sonorité ne tombe toujours pas dans le grotesque, se payant le luxe de faire jeu égal avec le Cayman, voire mieux. La boîte de vitesses oublie sa douceur en donnant les légers à-coups que j’aime tant en conduite sportive. Oubliez la violence d’une boîte F1 de F430 Scuderia, mais tout de même, ça fait plaisir dans ce monde où les boîtes de vitesses lissent toujours plus les sensations. Quant au moteur, il donne tout et le fait savoir. L’instrumentation numérique change pour afficher des LED qui s’allument tandis que je monte dans les tours puis un bip se fait entendre quand il est temps de changer de vitesse, sportif.
D’autant plus sportif que les reprises et les accélérations sont franchement là avec un 0 à 100 km/h en 4,5 secondes par exemple. Mais là n’est pas le meilleur, c’est définitivement la tenue de route qui m’envoûte. Je ne sais pas si je lis dans les pensées de l’alpine ou bien si c’est elle qui lit dans les miennes, mais j’ai vraiment l’impression de faire ce que je veux. Si je souhaite que l’arrière dérive, il le fait, si je ne le veux pas, il ne le fait pas et lorsqu’il le fait, c’est toujours en me prévenant et en m’accompagnant. Les freins, travailleurs infatigables, me permettent d’entrer en courbe en appui sur le train avant, délestant légèrement le train arrière qui me gratifie d’une saine dérive que j’arrête quand bon me semble en remettant les gaz en douceur afin d’asseoir le train arrière pour relancer l’Alpine faite ballerine. Jouissif, tout simplement !
Même si elle n’apportera jamais les sensations de l’A110 première du nom, les odeurs, les vibrations ou le ressenti de la route, réjouissons-nous de cette Alpine enfin venue au monde. Nous pourrions d’ailleurs lui faire dire ce que Corneille, dans le Cid, a fait dire à Rodrigue : « Je suis jeune, il est vrai ; mais aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années ». C’est bien le cas ici avec une berlinette sans réelle concurrence, entre des Lotus ou Alfa Romeo 4C bien moins logeables et confortables et les Porsche Cayman et TT S bien plus lourde, cossue et moins amusante. Jean Rédélé avait dit « J’ai choisi Alpine, car cela représente pour moi le plaisir de conduire à la montagne » et la nouvelle équipe lui fait largement honneur en proposant, effectivement, un vrai plaisir de conduire.
Bien vu :
- Performance
- Espace intérieur
- Confort
- Utilisable au quotidien
- Plaisir de conduire
- Etc.
À revoir :
- Manque de consistance du volant
- Quelques détails parce qu’il faut bien mettre un deuxième défaut
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