1998 était une belle période pour ceux qui l’ont vécue. Zinédine Zidane et l’équipe de France remportaient pour la première fois de leur histoire la Coupe du Monde de Football au Stade de France, onze États membres se qualifiaient pour la première phase de la monnaie unique, la première pièce en euro était frappée, et Renault faisait son show avec une publicité qui marquait plusieurs générations. Son slogan résonne encore dans mon imaginaire : « Et si le vrai luxe, c'était l'espace ? ».
Il est vrai qu’à cette époque, le SUV restait encore de l’autre côté de l’Atlantique, et les monospaces régnaient en maîtres sur le paysage automobile du vieux continent. Les choses ont changé, et l’iconique Renault Espace a dû s’adapter à cette nouvelle génération de familles, moins nombreuses, beaucoup plus aventureuses, mais surtout plus soucieuses de la planète que jamais. Voilà pourquoi il était temps pour moi de prendre cette nouvelle génération d’Espace pour un voyage au long cours. Un voyage qui m’a emmené « là où finit la terre » (du moins d’après les Bretons), en passant par les forêts de conifères landaises, le soleil irradiant de l’Alentejo au Portugal, pour finir ma course dans la verdure éclatante de la Dordogne. Bref… un périple effectif de plus de 6 000 km, pour vraiment statuer et savoir si « Le nouvel Espace, c’est pas du Luxe ? ».
Renault Espace : L’évolution ou la mort… ?
La fin des années 80 était une période faste pour la firme au Losange. Elle osait innover, bousculer et essayer des choses totalement hors du commun. À une époque où la berline classique dominait fièrement toute l’industrie automobile, Renault s’émancipait en proposant des véhicules hors normes. C’est dans cette période que naquit pour la première fois un van, que dis-je, un monospace sur le parquet des concessionnaires
Renault.
Le public comprit tout de suite que ce véhicule, rappelant un
TGV avec sa face avant plongeante et sa silhouette rectiligne, portait bien son nom d’Espace. Malgré sa taille modeste (4,25 m), il était capable d’embarquer une petite famille de cinq, voire même sept individus, sans oublier leurs bagages. Une révolution dans le style de vie, avec un châssis de voiture moderne et non d’un utilitaire lourdaud.
Son succès affola les compteurs de ventes et poussa, quelques années plus tard, les dirigeants de la firme à investir dans des versions plus compactes. C’est ainsi que naquirent la
Scénic Mégane ou la
Modus.
Oui, mais… les monospaces n’ont pas résisté au raz-de-marée
SUV.
Bien que moins pratiques, moins logeables et pas forcément plus performants, les automobilistes se sont tournés, depuis le milieu des années 2000, vers les SUV. Il faut dire que leur look de faux 4x4 sportif a fait craquer tout le monde.
Le dernier opus, le
Renault Espace V, marquait déjà une rupture avec le concept de monospace.
Mais notre
Espace VI ne laisse aucun doute.
C’est un SUV !
Un SUV bien dans l’ère du temps.
Sa proue ne vous est pas inconnue ?
Quoi de plus normal, puisqu’il s’agit, à peu de choses près, de la
même que celle de la nouvelle Renault Austral. On retrouve donc les fins optiques comme encerclées par des feux de jour à LED en forme de « C ». Au centre, une grande et large calandre à damiers lui donne de la prestance. Le bouclier est enveloppant et très travaillé sur les extrémités. Le profil, comme la face avant, est très proche de l’Austral. On remarque tout de même que la vingtaine de centimètres qui les sépare rallonge la silhouette arrière de cet
Espace. À l’arrière, on a l’impression que les designers ont tout simplement fait un «
Ctrl C » puis un «
Ctrl V ». On a donc droit à des feux en « C » qui se rejoignent au centre de la malle au niveau du Losange.
Renault Espace : L’habitacle, c’est pas du Luxe… ?
Dans l’habitacle, c’est du pareil au même.
En même temps, comme le dit le vieux proverbe : «
On ne change pas une équipe qui gagne. » Le
mobilier est donc identique à celui de l’Austral. On retrouve la planche de bord aérienne devant le passager et le gros bloc de pilotage à gauche. Pas de fioritures avec des matériaux hauts en couleur ou un mélange de textures et de finitions. Le mobilier est du genre sobre, élégant et efficace !
Le système multimédia repose sur deux dalles de 12 pouces, construites autour d’
Android Automotive. On s’y retrouve facilement avec des fonctions simples et ergonomiques, à défaut d’être stylisées. Cerise sur le gâteau, si vous vous connectez à vos comptes Google, vous retrouverez, sans brancher votre smartphone, tout votre agenda, vos contacts, vos adresses, votre musique, etc.
Ne soyons pas « peines à jouir », comme le disait notre chère maire de Paris : c’est le meilleur système du marché. Et ce, peu importe le prix, la gamme ou la marque du véhicule.
Pour ne rien gâcher, les ingénieurs ont même poussé la simplicité au maximum en créant un bouton pour configurer les
ADAS (Aides à la Conduite) à votre goût. Il suffit de double-cliquer sur cette touche pour les activer. C’est juste génialissime, car la plupart des autres constructeurs demandent une série d’actions délirantes pour arriver au même résultat.
La banquette arrière est coulissante sur plusieurs centimètres. Ainsi, vous avez le choix entre plus d’espace pour les jambes ou plus de volume de coffre. D’ailleurs,
ce coffre est différent de l’Austral. Les centimètres supplémentaires entre les deux SUV se retrouvent surtout ici. Et la raison est simple : ici se cachent deux sièges. Oui, pour mériter le nom d’Espace, il fallait bien pouvoir accueillir une grande famille, comme ses illustres ancêtres. L’
Espace VI est donc proposé de série en
7 places ou plutôt 5+2. Faire de longues routes sur un siège de la troisième rangée relève plus de la contorsion que de l’espace en première classe. Le luxe est peut-être dans la version 5 places, qui fait passer la capacité du
coffre à 777 litres, contre 159 litres en configuration 7 places, et libère de l’espace pour les jambes des passagers du deuxième rang.
Renault Espace : Un moteur, c’est pas du Luxe… ?
Alors que la tendance chez les constructeurs est de proposer une ribambelle de moteurs, qu’ils soient hybrides rechargeables ou extrêmement puissants,
Renault se contente d’un seul choix. Et inutile de compter sur une cavalerie à faire pâlir les dernières GT. Ici, on ne fait pas du Luxe, on est plus pragmatiques en installant sous le capot le moteur à tout faire de la marque.
Il s’agit du dernier groupe motopropulseur hybride : l’
E-Tech 200.
Il associe un petit
3 cylindres turbo essence de 1,2 litre à
deux moteurs électriques et une boîte de vitesses à crabots. Le premier moteur électrique développe 70 chevaux et s’occupe du train avant. Le second se contente de 25 chevaux et gère, par la même occasion, les passages de rapports de la boîte de vitesses ainsi que la régénération des batteries. Évidemment, comme tout hybride qui se respecte, ce bloc dispose d’une batterie pour alimenter les moteurs électriques. Ici, il s’agit d’une
batterie de 2 kWh sous tension
400 V.
Les chiffres sont dans la moyenne : une puissance annoncée de
200 chevaux, un 0 à 100 km/h réalisé en 8,8 secondes, et une vitesse de pointe de 175 km/h.
Heureusement, mon parcours ne passait pas par les Autobahns allemandes. Si la V-Max n’est pas synonyme de Luxe, j’ai pu profiter de son petit appétit.
C’est même mon expérience la plus bluffante depuis fort longtemps. Un engin tel que cet Espace n’a réclamé que 5,4 litres en moyenne sur mes 6 000 km. Je vous rappelle, c’est un moteur à essence !
Le pire, c’est sa consommation en ville : il est facile de jouer avec la batterie pour passer sous la barre des 4,5 litres. Sur autoroute, l’
Espace E-Tech 200 s’est contenté de
5,7 litres sur les autoroutes portugaises, espagnoles et françaises entre l’Alentejo et Paris. Un chiffre qui n’a rien à voir avec les SUV luxueux de la même trempe, qui réclament entre 7 et 9 litres…
Renault Espace : L’offre commerciale, c’est pas du lux… mais presque !
Renault a décidé de frapper fort avec l’
Espace E-Tech 200, et pas seulement sur le terrain des motorisations hybrides économes. C’est surtout au niveau des tarifs que le SUV joue la carte de l’accessibilité (toute proportion gardée). Disponible à partir de
43 000 € dans sa version d’entrée de gamme
Techno, l’
Espace VI se positionne bien en dessous de certains concurrents directs. Pour comparaison, un
Toyota Highlander Hybrid, certes légèrement plus grand, démarre à près de
55 000 €, tandis qu’un Kia Sorento hybride flirte avec les 50 000 €. Renault n’a donc pas fait dans le luxe ostentatoire, mais plutôt dans le luxe pragmatique.
À ce tarif, le modèle Techno propose déjà une dotation généreuse : double écran numérique de 12 pouces avec Android Automotive, sièges avant chauffants, climatisation automatique bizone, et aides à la conduite complètes (régulateur adaptatif, freinage automatique d’urgence, alerte de maintien dans la voie). La version Esprit Alpine (à partir de 47 000 €) ajoute un style plus sportif avec des touches de bleu, des finitions spécifiques et une sellerie plus raffinée. Enfin, au sommet de la gamme, la version Iconic (51 000 €) pousse encore plus loin avec des équipements comme l’affichage tête haute, le toit panoramique ouvrant et une sellerie cuir.
En matière de modularité, c’est également bien pensé : les 7 places sont de série sur toutes les versions, ce qui n’est pas toujours le cas chez les concurrents. L’astuce des sièges arrière coulissants pour moduler le volume du coffre (jusqu’à 777 litres en configuration 5 places) est un vrai plus pour ceux qui cherchent un SUV familial polyvalent sans passer par les gammes premium.
Avec une telle offre,
Renault réussit à proposer un SUV spacieux, bien équipé et raisonnable en tarif. C’est loin d’être du « low cost », mais ce n’est pas non plus l’étalage de luxe inaccessible que certains concurrents veulent imposer. Bref, un compromis malin pour séduire les familles.