Renault Espace : Vrai haut de gamme
Du temps des youngtimers,
Renault s’est déjà essayé au luxe. Il y eut, notamment, les Baccara, une finition lancée sur la Super 5 et à l’apogée symbolisé par la R25 encore plus que sur la Safrane Biturbo de mon point de vue ; Renault 25 qui connut d’ailleurs un modèle Limousine dont un exemplaire profita à François Mitterrand. Il est toujours bon pour un manufacturier de trouver des ambassadeurs. Emmanuel Macron en est un pour l’Espace. Kevin Spacey en fut un autre avant lui, mais j’ai comme un doute sur le fait que Renault aime qu’on le rappelle…
En 1997, la bascule se fait sur un nouveau nom :
Initiale Paris. Cela ne s’est pas fait sans raison puisque deux ans plus tôt,
Renault présenta le concept Initiale (préfigurant le concept Vel), à l’intérieur signé Louis Vuitton, et motorisé par un V10. Longtemps mis en pause par la finition Initiale, le label Initiale Paris (IP) est réintroduit en 2013 par le prototype du même nom, préfigurant les lignes du futur Espace. En matière de luxe, Renault s’autorisa une folie sur les premiers millésimes répondant au nom d’Executive. Basée sur l’IP, elle remplace les trois sièges de la rangée 2 par deux fauteuils individuels séparés par une console centrale. Cette préparation coûtait 30 500 €.
Renault Espace : Plus crossover que monospace
L’Espace a lancé la mode du monospace en Europe. Il marqua également la collaboration entre
Matra et
Renault, et alla jusqu’à rejoindre
Alpine quitte à faire une entorse à l’histoire vis-à-vis des dissensions qui opposèrent
Alpine et
Matra. En effet, à partir de 1988, un nombre conséquent d’Espace furent assemblés sur les chaînes de l’usine de Dieppe afin d’en assurer la pérennité.
Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts. Cela vaut pour la définition même du véhicule. Renault a visiblement senti le vent tourner pour le monospace, mais pas totalement quand même, en laissant sa chance au Scénic. Quoi qu’il en soit cette cinquième génération d’Espace se veut être un crossover. Un produit à mi-chemin entre le monospace et le SUV qui met des paillettes dans les yeux des constructeurs. Malheureusement, à ne pas choisir clairement son camp, l’Espace n’a conquis presque personne.
Pas de grand bouleversement pour le restylage, dévoilé il y a déjà un an. Les changements les plus visibles se situent au niveau du bouclier avant tandis que les projecteurs sont matriciels à LED (Matrix LED dans la langue de Shakespeare). À l’arrière aussi, la signature lumineuse opère sa mutation. L’Initiale Paris adopte des jantes de 20 pouces reprenant le dessin de la tour Eiffel.
Renault Espace : Impressions à bord
Long de 4,85 m, l’Espace a sacrément grandi par rapport à son aïeul de 1984 qui ne mesurait que 4,25 m. Aujourd’hui, une
A110 de nouvelle génération ne lui céderait que 7 cm ! C’est dire l’évolution des espèces automobiles.
Si, de l’extérieur, ses dimensions imposantes ne se voient pas forcément tant que ça, c’est tout l’inverse lorsque l’on ouvre la porte conducteur. L’intérieur est gigantesque. Il faut dire que le vaisseau amiral français est capable d’embarquer (en option) six moussaillons en plus du capitaine de soirée. Il n’y a pas grand-chose à redire sur la finition, la qualité des matériaux (sellerie cuir Gris Sable Clair du plus bel effet) et l’équipement de série. Heureusement, certes, avec un prix catalogue de 56 300 € dans cette déclinaison. Tout y est, dont le régulateur de vitesse adaptatif. Étant réfractaire à ces joujoux, je ne suis cela dit pas le plus à même d’en parler.
L’imposant écran central tend à démontrer que finalement, pour les clients (la bienséance me fera conserver le masculin) la taille compte… Le fonctionnement du récent Easy Link a le mérite d’être correct, même si ça ne fait toujours pas dans l’intuitif. Enfin, les compteurs (numériques) offrent le choix entre quatre présentations.
Le ticket d’entrée de l’Espace en Zen Blue dCi 160 EDC est fixé à 44 100 €. Notre gros diesel démarre en Intens à 51 600 €, tandis que le TCe 225 carburant au Sans Plomb est vendu à 48 600 € en Intens et à 53 300 € en Initiale Paris. Ce moteur, étroitement dérivé de celui de l’
Alpine A110 Première Édition (non FAP, précision importante) vit ses derniers instants. Il ne sera pas reconduit pour la future norme Euro6dfull. Avec des rejets de CO2 compris entre 187 et 197 g/km, il ne devrait pas manquer à grand monde en France…
Renault Espace : Moteur très bien, mais la boîte ?
Mon titre, bien que trop long, est incomplet. Et il ne faut plus dire dCi, mais BluedCi du fait des avancées en matière de dépollution. Ce tout nouveau M9R (détaillé dans l’essai de la Talisman) cumule catalyseur HC-CO avec un système de réduction catalytique sélective (SCR – procédé qui transforme les NOx par réduction catalytique en post-traitement) et un filtre à particules. Il réclame de l’Adblue (sans pénaliser l’agrément pour le propriétaire avec son gros réservoir de 22 litres).
Grâce au
gros couple de 400 Nm issu de sa belle cylindrée, l’agrément, justement, est au rendez-vous. Les reprises sont plus qu’honorables en dépit d’un poids de 1 900 kg. J’ai l’honneur de vous informer que j’ai tenu le volant de la seule voiture française (sauf erreur de ma part) assujettie au malus au poids de 2022. Cocorico !
Pas de
technologie hybride E-Tech (détaillé dans ce dossier puis dans notre
essai Captur), car cela aurait réclamé trop d’investissements pour un modèle en fin de vie. Dommage, puisque cet
Espace cumule un second malus, plus coûteux celui-là. Si les valeurs d’émission ne changent pas, il sera compris entre 3 784 € (173 g/km) à 4 279 € (175 g/km). La consommation sur notre essai ne s’est pourtant pas envolée avec une moyenne de 6,5 l/100 km, à bon rythme pour éviter le couvre-feu !
Malheureusement, même quand l’offre moteur est enfin à la hauteur, un caillou se glisse dans la chaussure. En voyant ce qu’est devenue la boîte EDC chez
Renault Sport (à la fois sur la
Mégane 4 RS et sur l’
A110 bien qu’il s’agisse de deux boîtes différentes), nous sommes en droit d’attendre un même niveau sur les autres produits. La distinction gamme centrale/département sportif semble toujours d’actualité. C’est d’autant plus incompréhensible que Renault Sport Cars a été sollicité pour travailler sur la Clio hybride ou bien pour promouvoir la
finition R.S. Line. Alors, svp, quitte à dépenser des millions dans un nouveau moteur, offrez-lui la boîte qui va bien ! Et accessoirement des palettes, un élément indispensable pour contrecarrer une mauvaise gestion de boîte ! On se croirait revenu en arrière d’une décennie avec une boîte lente qui mouline. Oubliez le mode Sport pour la transmission, ça vire au n’importe quoi. Au moins, on subit un semblant de douceur dans les autres modes.
Enfin, je terminerai sur le levier de vitesse, à l’esthétique copiée à un premium allemand. Son maniement s’avère plutôt pénible et le passage en marche arrière se fait un peu quand bon lui semble. Incompréhensible d’en être encore là…
Renault Espace : Highway to paradise
De longs trajets ont permis de faire le tour de la question du comportement routier de la bête. Ne pouvant plus aller en Amérique, nous avons fait venir l’Amérique à nous ! Une GTA US nous attendait à Chateaufort pour la réalisation du futur livre Alpine (après la trilogie
Renault Sport mentionnée ici). La veille, nous avions rendez-vous en Normandie, non loin des terres d’origine du A fléché. C’est là que Julien s’est amusé à immortaliser l’
A310 VE au côté de notre Espace. Sans le savoir, il vient de faire une photo prémonitoire, si la volonté affichée par Luca De Meo de faire de l’Alpine Line se concrétise.
Revenons à nos moutons. La position de conduite est, de prime abord, déroutante. On finit par s’y faire, à peu près. Sur autoroute ou voie rapide, c’est royal au bar. Conforts de suspension et des fauteuils font des miracles. En revanche, sur routes dégradées, le compromis déçoit. Entre dynamisme et confort, il faut faire un choix. Malgré de nouveaux réglages, la suspension ne sait pas concilier les deux. Le
4Control (quatre roues directrices) est de série pour donner de l’agilité. Le principe est toujours le même : agilité à faible vitesse (roues arrière braquées dans un angle inverse à celles de l’avant) et stabilité au-delà de la vitesse « de bascule » (roues arrière braquées dans le même sens, a contrario). En mode Sport, c’est relativement efficace. Reste à savoir si l’on achète pareil engin pour être secoué…