La segmentation automobile et son interprétation ne sont pas chose aisée. Dans la plupart des cas, c’est la longueur qui fait foi pour segmenter le marché automobile, donnant parfois quelques fils à retordre avec certains modèles qui jouent à la lisière des segments. Mais arrivent ensuite des définitions moins évidentes lorsqu’il s’agit de départager certaines formes de carrosserie, comme les SUV par exemple.
Mais nous pensons aussi au titre ultime de supercar, qui retrouverait ses origines en Europe dans un texte de presse au sujet de la Lamborghini Miura, dans les années 70. Un terme officieux, qui a longtemps caractérisé une poignée de sportives haut de gamme, fers de lance technologiques de leurs constructeurs respectifs, qui ne découlaient pas d’un modèle de grande série et étaient exclusivement proposées en quantité limitée.
Le temps filant et les technologies évoluant à grands pas, le terme de supercar s’est rapidement éparpillé, en se basant d’une part sur les niveaux de performances d’une voiture, d’autre part sur les formes de carrosserie et/ou la position du moteur. Un véritable fourre-tout qui fait désormais les choux gras des différents départements marketing, au même titre que le terme de SUV désormais utilisé à toutes les sauces.
La plus petite des supercars
Preuve en est avec
Abarth qui, à la présentation de la nouvelle 595, a indiqué que sa citadine sportive était « une petite supercar qui peut évoquer une richesse de sensation sur la route comme sur la piste ». Un terme utilisé sans rougir en raison de la « performance explosive », le «
son de l’échappement », le «
style irrévérencieux » et le « plaisir de conduite » de la
595. Rien que ça ! Mais cela est-il suffisant pour la qualifier de supercar ? Pour nous en assurer, nous lui avons opposé une véritable supercar (ou du moins ce qui s’en rapproche le plus) : la
McLaren 720s.
Intégrée dans la gamme
Supercar du constructeur anglais (forcément), la
McLaren 720s est l’une de ces supercars modernes, laissant alors la Speedtail, celle qui aurait pu avoir le statut comme la
McLaren F1 en son temps, briller dans le monde des hypercars (un autre débat). Aussi représentante du savoir-faire de la marque, dotée des dernières avancées technologiques au service de la performance, la
720s ne laisse planer aucun doute sur son appartenance.
La recherche aéro pour les vraies supercars
À commencer par sa plastique sulfureuse, entièrement dictée par les flux aérodynamiques, primordiaux à ce niveau de performance. Plate, large, courbée et dotée d’appendices aérodynamiques actifs, la
McLaren 720s joue la carte de l’exotisme avec certaines pirouettes stylistiques à l’image des blocs optiques intégrés dans les prises d’air avant, des canaux d’air à l’intérieur des portes et une double sortie d’échappement posée sur le bouclier arrière.
Et des pirouettes, justement, la petite puce des villes aux prétentions sportives en effectue énormément. À commencer par des choix stylistiques ostentatoires sur une voiture de ce gabarit, à l’image de son bouclier avant, son large diffuseur arrière doté de deux sorties d’échappement (là aussi) et d’un aileron de hayon fixe.
Fibre de carbone pour tous
À l’intérieur pas de surprise non plus, et l’Abarth 595 ne peut se permettre de s’autoproclamer supercar. Non pas que ses différentes attentions comme les ceintures rouges ou les impressionnants sièges baquets ne soient pas au niveau, mais la position de conduite héritée de la citadine est troublante. Mais ses efforts sont louables, avec l’emploi massif de fibre de carbone. Comme à bord de la
McLaren qui, elle, propose ses inserts en option : comptez 5 800 € de plus, par exemple, pour faire installer la fibre de carbone autour des lève-vitres, sur les branches du volant ou sur la console centrale.
Pour le reste, l’
Abarth singe les plus grandes avec une instrumentation teintée de rouge et une pseudo télémétrie pour surveiller de près les données mécaniques de la voiture. Mais elle rejoint facilement le monde des supercars avec ses différents aspects pratiques : car avec 180 l de coffre, elle fait à peine mieux que les 150 l situés à l’avant de la
720s Spider, pourtant privée de ses 210 l de volume à l’arrière dans le coupé !
Une force d’attraction
Passons rapidement sur le chapitre des performances, complètement inutile dans ce comparatif volontairement farfelu. D’autant que la
McLaren 720s se situe tout en haut de la chaîne alimentaire automobile en matière de performances. Et on ne parle pas du temps d’ouverture du toit de la Spider, qui réclame presque autant de temps que le 0-130 km/h de l’
Abarth (11 s contre 10,3 s). Mais bien des performances en ligne droite : quand l’Abarth a passé les 100 km/h (en 6,7 s), la
720s vient de franchir les 190 km/h et s’apprête à rentrer dans une autre dimension. Mais, à sa façon, l’
Abarth sait aussi faire ça.
Dès le premier tour de clé, la citadine sportive arrête le temps autour d’elle comme n’importe quelle supercar sait le faire. La raison : la sonorité envoyée par sa double sortie Akraprovic qui, à défaut d’être vraiment raffinée, est une véritable pompe à décibels. Vous avez beau enlever le toit de la McLaren 720s Spider ou ouvrir ses superbes portes en élytre, le démarrage de la
595 Esseesse fera tourner davantage les têtes. De quoi largement participer à l’expérience de conduite, qui n’a pas à rougir toutefois avec son châssis réglé aux petits oignons : les amortisseurs Koni FSD, le différentiel à glissement limité de type
Torsen, le freinage
Brembo et les
Pirelli P Zero Nero améliorent sensiblement le comportement de la bombinette.
Conclusion:
C’est quoi finalement, une supercar ?
Fabriquer une supercar ne s’invente pas. Fière de l’une des plus abouties d’entre elles, la F1,
McLaren a une longueur d’avance dans le domaine. Même si à nos yeux conservateurs, cela ne la dénigre pas pour autant, la
McLaren 720s est davantage une super sportive à moteur central arrière plutôt qu’une supercar au sens historique du terme. Soit. La hiérarchie bougeant aussi vite que les technologies évoluent, elle peut légitimement s’autoriser le titre.
En revanche, à la définition de «
capilotracté » dans le dictionnaire illustré, il y aurait une photo de l’
Abarth 595 Esseesse : usant d’artifices pour s’offrir un caractère unique, la bombinette, aussi plaisante soit-elle à rouler, ne peut pas s’autoproclamer supercar. Ou du moins selon les critères habituels qui définissent la catégorie ultime.
Mais comme la
McLaren 720s, elle dispose d’une capacité d’attraction insoupçonnée dès le lancement de son timide 1,4 l turbo. Et si, finalement, ça ne serait pas ça, une
super-car ? Une voiture capable de mettre en éveil tout ou partie des sens des badauds qui l’entoure. À ce jeu, l’
Abarth n’a pas à rougir, et nous ne nous y attendions pas.
Performance