2016. C’est le 16 novembre de cette année que fut présenté, à Los Angeles, le Stelvio, dernier modèle commercialisé par Alfa Romeo. Il fallut attendre 5 ans et demi pour découvrir la version définitive du troisième larron de la gamme, prenant également le nom d’un col italien. Quant à l'avenir, nous l'avons évoqué à travers le plan produits validé jusqu'en 2027.
Alfa Romeo Tonale : mission reconquête
C’est le 3 mars 2019 que fut annoncée la présentation d’un concept au salon de Genève. Prenant le nom de Tonale, il s’agit d’un C-SUV reprenant une base retravaillée de
Jeep Compass. Nous sommes bien avant la création du groupe Stellantis et après le décès de
Sergio Marchionne, instigateur de la relance d’
Alfa Romeo (comme je le rappelle dans cette actualité en remontant aux 4 C et 124).
Nous en sommes au second renouveau d’Alfa, le premier dans le groupe Stellantis. Du pôle premium, complété par DS et Lancia, Alfa Romeo est la seule marque monde. Par ailleurs, elle incarne la quintessence de la
sportivité représentée par la doublette Giulia GTA/
GTAm, ainsi que par la présence d’Alfa en
Formule 1.
Alfa Romeo Tonale : cinq piliers
La communication concernant le Tonale s’articule autour de cinq axes : metamorfosi, dynamic, technology, software et ADN. Le modèle de série reprend les grandes lignes plutôt réussies du concept, et a été retardé de quelques mois par le patron d’Alfa, Jean-Philippe Imparato. Je reviendrai sur ce point plus tard.
Mesurant 4,53 m, le SUV italien est plus long, mais aussi plus large, que ses homologues de la catégorie. Les codes stylistiques du constructeur sont repris. On pense aux fameuses jantes téléphone, à la signature lumineuse 3 + 3 et au trilobo. Signe que les échappements visibles ne sont plus dans l’air du temps, la canule est « cachée ». Par ailleurs, le choix stylistique a dicté la décision de ne pas proposer de jantes 17″, à l’exception des modèles destinés aux flottes. Enfin, les projecteurs sont en technologie
LED Matrix à partir de la finition Ti. L’ensemble est relativement convaincant,
plus que le Stelvio, paradoxalement.
Dans l’habitacle, il y a du bon et du moins bon. L’éclairage d’ambiance peut contenir jusqu’à 5 coloris, selon les finitions. Outre le joli volant, les palettes (optionnelles) en alu brossé et le piano de commandes, c’est sur le cockpit digital personnalisable et les deux grands écrans d’une taille totale de 22,5 pouces que compte Alfa Romeo pour séduire les clients. La leçon du mauvais multimédia au lancement de la Giulia a été retenue. C’est toutefois en contradiction avec l’interview de Jean-Philippe Imparato donnée à BFM Business, en date du 17 septembre dernier. Finissons par le coffre dont la capacité de chargement est annoncée pour 500 litres avec la banquette arrière, et pouvant atteindre 1 550 litres.
Dommage que certains éléments de présentation soient quelque peu tarabiscotés, comme l’espace au-dessus du levier de vitesses. Par ailleurs, le choix des matériaux n’est pas au niveau de la concurrence visée, même s’il faut avoir l’honnêteté de dire que la qualité baisse significativement ces derniers temps chez Audi.
Alfa Romeo Tonale : finitions et tarifs
Les
finitions se divisent entre GT (Super, Ti) et Sport (Sprint, Veloce). Dans tous les cas, la boîte TCT à double embrayage est incluse en série. La Super, servant d’entrée de gamme, commence à 35 400 € et n’est proposée qu’en 130 chevaux, en attendant le futur diesel 1,6 l en option. La Sprint, avec les mêmes moteurs, est 2 500 € plus cher. Dans l’autre branche, la Ti est facturée 5 000 € de plus que la Super et incorpore en
série le 160 chevaux VGT, tandis que la Veloce réclame à son tour un surplus de 2 500 €. La Speciale est une édition de lancement – non limitée – proposant les 2 moteurs essence. À 39 000 €, elle est bien placée au vu de ses équipements (dont les jantes 20″), dans le contexte actuel et par rapport à la concurrence.
Pour l’anecdote, du véritable cuir sur les sièges est encore proposé pour l’option cuir.
Alfa Romeo Tonale : garantie 5 ans
Après le design et les écrans, voici le troisième argument de vente.
Alfa Romeo France et Espagne incluent de série la garantie 5 ans/200 000 km. Confiant dans son produit de l’usine de Pomigliano, largement modernisée, Alfa entend ne pas perdre de ventes sur la peur potentielle d’un manque de fiabilité. Pour rappel, les
Giulia et
Stelvio sont, de leur côté, garantis 3 ans.
Pour aller de pair avec ce souhait de viser un haut niveau de qualité, le Tonale est le premier véhicule de série à proposer le NFT. Pas le NFT spéculatif tel que l’on pourrait l’entendre, mais un NFT doté de données infalsifiables sur la vie du véhicule. Un plus, d’après le constructeur, pour assurer une traçabilité sans faille.
Restons sur les technologies, puisqu’en plus d’aimer les virages sur la route,
Alfa Romeo a pris le virage des geeks. Mises à jour gratuites « over-the-air », assistant Google et pack niveau 2 de conduite autonome sont disponibles sur le
Tonale.
Alfa Romeo Tonale : motorisations
Concentrons-nous dans un premier temps sur le seul moteur disponible : le
1 500 cm3 mild hybrid 48V, disponible en 130 et
160 chevaux. Seul le turbocompresseur change entre les deux évolutions du bloc d’origine FCA, en sachant que le couple maximal est dans les deux cas bridé à 240 Nm. Reprenant l’appellation TCT de l’ancienne boîte à double embrayage conçue par
Alfa Romeo, cette boîte à 7 rapports est de conception nouvelle. Fournie par Getrag, elle équipe déjà le Compass (avec la même mécanique d’ailleurs). Elle a pour particularité d’inclure l’hybridation par le biais d’un e-motor. Toutefois, par rapport au
Compass, l’ensemble logiciel a été revu pour s’adapter au mécanisme DNA gérant les modes de conduite. Permettant de rouler sans le moteur thermique en marche arrière et jusqu’à 15 km/h (en modes A et N uniquement), cette hybridation se rapproche dans les faits d’une hybridation classique. En revanche, point d’hybridation «
écologique » en D, le 48V servant de boost au moteur thermique.
Autant le dire tout de suite, le DNA est une mauvaise idée depuis son lancement sur la
MiTo, et ce n’est pas le Tonale qui va faire exception. Il y a trop de différences entre les modes N et D (cartographie, gestion de l’accélérateur) pour ne pas rouler en D. Le mode N a carrément des airs de mode Eco tant il étouffe le moteur. À se demander si le seul intérêt du DNA n’est pas de passer le cycle d’homologation… Pour avoir testé les modes N et D, l’écart sur la différence moyenne de consommation tourne autour de 1 l/100 km pour un parcours similaire. Le parcours en Dynamic était, justement, plus dynamique. Pour la boîte, c’est l’inverse. Sa gestion est plus convaincante en N qu’en D, où elle prend trop de tours pour rien. Mieux vaut alors verrouiller le mode manuel et avoir les palettes ! Le DNA a comme autre défaut de ne pas proposer un mode individuel où on choisit chaque élément indépendamment. Avec une moyenne de 9 l/100 km, avec un prix à la pompe dépassant les 2 €/litre, c’est embêtant. Pour terminer sur ce thème, les émissions de CO2 varient selon les équipements et démarrent à 135 g/km. Quant à l’agrément, je n’ai pas vu de franche différence entre les variantes du moteur. Dans les deux cas, il se révèle assez paresseux à monter dans les tours sans être non plus particulièrement rond…
La motorisation
hybride rechargeable se fait donc attendre. Faisant partie des éléments retardés, elle revendiquera 275 chevaux contre les 240 initialement prévus, alors que son réservoir aura une contenance de 13 litres de plus que ce qui était prévu. Le diesel a également pris du retard, car il n’était prévu qu’en boîte manuelle. Il basculera sur la boîte TCT, mais à 6 rapports, sans hybridation. La boîte Alfa.
Alfa Romeo Tonale : sur la route
Le DNA joue également sur la direction. Une raison supplémentaire de passer en D. Trop légère de base, elle gagne alors en consistance. On comprend quand même quasiment immédiatement que, si l’auto ressemble à une Alfa (pour peu qu’un SUV puisse avoir une gueule d’Alfa), on n’est pas au volant d’une Alfa. Mais après tout, puisque ce n’est pas le but recherché, et qu’il y a peu de chances qu’un Alfiste craque pour ce genre de carrosserie… Le comportement routier est acceptable, mais pas digne de ce qu’on attend de la «
BMW italienne », surtout après que les
Giulia et
Stelvio aient mis la barre si haute avec la
plateforme Giorgio.
Outre la déception de repasser à la traction, que Marchionne voulait arrêter, c’est le ressenti global qui déçoit. Ce n’est pas mauvais du tout (probablement mieux qu’une MiTo), mais ce n’est pas non plus bouleversant. C’est dans la norme, inférieure à un
Peugeot 3008, des souvenirs que j’en ai.
Le véritable point noir concerne l’amortissement. Pour donner un semblant de dynamisme, il a fallu raffermir les suspensions. Or, en optant pour Koni comme fournisseur, on part déjà avec un certain handicap. Ne cherchez pas de suspensions pilotées, il n’y en a pas. La Veloce est la seule finition à avoir la technologie FSD (Frequency Selective Damping). N’ayant pas pu l’essayer, espérons que cela soit mieux calibré que chez Abarth.
En ce qui concerne le freinage, il reprend la technologie IBS (brake by wire), lancée sur la
Giulia. Il n’y a rien de spécial à dire sur ce sujet, ça fait le travail correctement.