Cinq ans. C’est le nombre d’années qu’il aura fallu attendre pour voir arriver la nouvelle génération de Honda Civic Type-R. Véritable icône dans le monde des compactes sur-vitaminées, symbole ultime de la sportive japonaise hurlant sur un touge nocturne et parfaite définition du mouvement JDM, la bombinette de Honda est chargé d’histoire. Pour cette nouvelle venue, le fabricant marche donc sur des œufs : la Civic est plus grosse que ses devancières et, surtout, son traditionnel moteur VTEC atmosphérique gagne un turbo ! Une évolution logique, dans l’esprit japonais, mais Honda n’a pas le droit à l’erreur pour éviter de froisser les passionnés piqués par les montées en régime du célèbre bloc K20.
Japanese Domestic Market :
Comme la plupart des compactes sportives avec lesquelles elle rivalise, la Honda Civic Type-R ne fait pas dans la dentelle sur la partie cosmétique. Forcément, la mode actuelle est au tape à l’œil, mais aussi à l’efficacité aérodynamique. Traduit en japonais, dans un pays où la plupart des spécialistes du Time Attack résident, la Civic reçoit force appendices aérodynamiques et un fond presque plat. La partie avant s’équipe d’un bouclier fortement ajouré et agrémenté d’une lame qui canalise les flux d’air sur les côtés. A l’arrière, la compacte verse dans le spectaculaire avec un diffuseur, quatre sorties d’échappement et un imposant aileron posé sur les feux. Les ailes bombées n’ont rien à envier à certaines productions de tuners japonais, mais les baguettes des arches de roues arrière sembleraient avoir été posées à la va-vite. Cependant, cela permet à la compacte de profiter d’une portance aérodynamique négative. Dans l’ensemble, la Honda Civic Type-R s’inspire fortement du concept éponyme, mais la formule choisie pour ce dernier était plus homogène et spectaculaire. Peut-être que certaines considérations industrielles ont eu raison de ces choix stylistiques ?
Dans l'habitacle, la Civic Type-R véhicule toujours ses ambitions sportives. Si le dessin général de la planche de bord est toujours aussi futuriste, la compacte reçoit des équipements spécifiques : on note la présence d'un pédalier et un pommeau en aluminium usiné, une tradition pour les Type-R de chez Honda, d'un volant spécifique avec des coutures rouges et des imposants sièges baquets qui, s'ils ne facilitent pas l'accès à bord, affichent un maintien latéral exemplaire. Dans ce cocon sportif mais pas radical, on pourrait même se mettre à chercher un harnais.
Le conducteur peut également profiter d'un compte-tours qui indique quand changer de rapports et d'un système d'information i-MID qui comprend un accéléromètre, la pression du turbo et de l'huile, les températures des fluides, une jauge de pression sur les pédales de frein et d'accélérateur et un chronomètre pour les temps au tour, le 0-100 km/h et même le 0-400 mètres. En pressant une touche sur le volant à l’arrêt, le shift light fait office d’arbre de noël, comme sur une piste de dragster, et le conducteur peut essayer d’exploser ses propres temps sur cette distance. Un gadget pas vraiment utile mais, vous vous en doutez bien, hautement indispensable pour perdre quelques année d’âge mental.
Le VTEC est mort. Vive le VTEC :
Pour des raisons évidentes de normes anti-pollution, mais surtout pour garder un niveau de puissance à la hauteur de la concurrence, la Honda Civic Type-R a eu recours à la suralimentation. Une nouveauté qui, en début d’année, a fait considérablement monter les actions des fabricants de mouchoirs, mais qui lui permet d’afficher une fiche technique alléchante : 310 ch à 6 500 tr/min et, c’est une première sur une Honda, beaucoup de couple, avec 400 Nm de 2 500 à 4 000 tr/min. Pour comparaison, l’ancien K20Z3 de la Civic Type-R FN 2 sortait 201 ch à 7 800 tr/min et 193 Nm a 5 300 tr/min. Le 4 cylindres 2,0 litres poussait même au crime, en allant tutoyer les 8 000 tr/min avec facilité. Avec un turbo, ce K20C1 tourne forcément moins vite, mais la bombinette s’autorise toutefois un régime de rotation maximal fixé à 7 000 tr/min.
Même s’il ne se passe plus rien de passionnant à partir de 6 000 tr/min, et si la fidèle communauté ne pourra plus crier haut et fort le fameux VTEC just kicked in, Yo!, le moteur fait l’étalage d’un caractère bien trempé sur l’ensemble de la plage d’utilisation. Basé sur la solution technique dite scavenging, le VTEC autorise toujours deux profils de came, mais à l’échappement. Alors que les soupapes d’admission continuent d’alimenter les cylindres, celles de l’échappement sont ouvertes pour faire tourner le turbo. Ainsi, l’escargot est déjà dans les tours, ce qui réduit le temps de réponse, au plus grand bénéfice des performances : la nouvelle Civic Type-R affiche un 0-100 km/h en 5,7 secondes et des reprises intéressantes, bien aidé, aussi, par une boîte 6 manuelle bien étagée (notons un quatrième rapport un peu long). Pas d'effet coup de pied, ni même de lag et encore moins d'effet VTEC, donc, mais le moteur est toujours disponible. Côté sonorité, les quatre canules annonciatrices peuvent décevoir. A bas régime, le son est alléchant mais n’hésite pas à verser dans le domaine de l’électroménager à l’approche de la zone rouge. Surtout, le bourdonnement dans l’habitacle entre 4 000 et 6 000 tr/min empêche les occupants de tenir une conversation. A vouloir trop en faire…
Une donneuse de leçons aux références :
D’ailleurs, on félicite les ingénieurs japonais, qui ont su résister au chant des sirènes d’une unité robotisée, au profit du plaisir de conduite. Si la Civic FK2 est un modèle de performance ultime (on se souvient du battage médiatique à l’issue du tour du Nürburgring), elle oublie d’aller chercher les derniers dixièmes pour occuper le haut du tableau. Car la commande de boîte est, à elle seule, un régal, avec des débattements utra-courts, une consistance mécanique agréable et elle se manie du poignet. Seul le guidage parfois un peu flou peut venir entacher le tableau.
Au chapitre dynamique, la super GTI japonaise est fidèle aux produits en provenance de l’archipel. Reposant sur un châssis relativement bien étudié, la Honda Civic Type-R se permet même de donner des leçons à la Renault Megane RS Trophy-R. Le train avant à pivot découplé et épaulé par un différentiel à glissement limité GKN est un sans faute. Dans la courbe, l’autobloquant n’est jamais intrusif mais fait savoir qu’il travaille dur pour aider la voiture à rester sur sa trajectoire et à la remise des gaz. Ce n’est peut être pas aussi précis, à la limite, que sur la concurrente française, mais elle se rattrape avec une motricité sans failles et des remontées de couple inexistantes. Un véritable outil qui obéit au doigt et à l’œil du conducteur. Lors de ces exercices, teintés d’une conscience professionnelle exacerbée, nous avons toutefois remarqué un train arrière trop sérieux, qui n’autorise qu’une légère dérive en freinage pour la mise en trajectoire.
Les plus chevronnés pourront aussi activer le mode +R, qui affermit les amortisseurs pilotés Sachs, durcit la direction, rend l’accélérateur plus réactif et libère légèrement le contrôle de stabilité. Une fois le tableau de bord allumé en rouge, les changements sont peu perceptibles mais le pilotage réclame de la finesse, notamment sur les phases de freinage où le train arrière se montre plus vif aux changements de cap.
De l'efficacité sans la radicalité :
Tout en étant plus vivable qu’une Renault Megane RS trophy-R (coffre de 455l, quatre places, pas de harnais, pneus route), la Honda Civic Type-R est aussi efficace sur route que sur circuit. Preuve en est avec le récent chrono de 7’50’’80 sur la boucle nord du Nürburgring. Les détracteurs pourront aisément pointer du doigt la présence d’un arceau de sécurité, témoignant des modifications apportées à la voiture, mais Honda est formel : l’exemplaire utilisé est, à ce détail prêt, conforme aux modèles de série, pneus Continental ContiSportContact 6 compris. A ce sujet, il est certain que des pneus à profil semi-slick pourraient largement développer le comportement routier de la GTI.
A 35 000 € pièce, la Honda Civic Type-R n’est pas des plus onéreuses et elle devrait pouvoir laisser les propriétaires apporter de nombreuses modifications, comme de coutume avec ce type de véhicule. Si les freins puissants et endurants (on regrette toutefois une course longue lors de gros freinages qui limite le talon-pointe) ne méritent pas de disparaitre, les pneumatiques pourront être changés pour des Michelin Cup 2, et la ligne d’échappement pour un modèle plus bavard. Lors de notre essai, les ingénieurs japonais nous ont aussi indiqué que la Civic Type-R a été pensée pour la préparation. Le bloc K20C1 pourrait-il donc encaisser plus de chevaux ? La réponse bientôt, avec les maîtres en la matière qui pourront travailler sur l’une des meilleures, si ce n’est la meilleure, compactes sportives. En attendant, les japonais recommandent de rabattre la banquette arrière pour abaisser le centre de gravité. Un japonais, aussi rigoureux soit-il, ne manque pas une occasion d’être facétieux. Un peu comme cette nouvelle Honda Civic Type-R, rigoureuse, mais qui donne le sourire au conducteur et la rend terriblement attachante.
Note : 17/20
Bien vu :
- Look assumé
- Caractère de la mécanique
- Performances
- Motricité et comportement exemplaires
- Prête pour la préparation
À revoir :
- Sonorité
- Attaque de la pédale de frein
- Mode +R qui exige de la concentration
2024 3066 km Automatique Essence
2018 91800 km Manuelle Essence