Essai Alfa Romeo Tonale Hybrid Q4 : cette fois-ci, c’est la bonne ?

Tonale en préambule 

Le design automobile et l’Italie, une grande histoire d’amour, évidemment. Quels plus grands carrossiers et constructeurs que les Italiens… ? Et comment oublier Alfa Romeo dans ce patrimoine ? Aussi, rien ne laisse indifférent quand on évoque la marque, notamment sur les réseaux sociaux. Et certains tombent en pâmoison devant une Giulia, en grande partie parce que c’est une Alfa… sans aller forcément au bout du processus d’achat. Et on retrouvera l’acheteur potentiel chez BMW pour une Série 3. L’éternelle guerre des berlines sportives entre les deux constructeurs ! Sur la période récente, si l’époque 147-156 était faste (certains verront le verre à moitié plein en évoquant l’absorption par Fiat et le choix technique moins noble de la traction…), celle des MiTo et Giulietta était bien plus terne, et dotée de tant de restylages peinant à cacher le peu de moyens pour dynamiser la marque… La Giulia est ensuite arrivée après cette longue période de disette et avec l’argument d’une merveilleuse nouvelle plateforme propulsion Giorgio, gage d’un dynamisme redoutable. Mais c’était compter sans la certaine arrogance du lancement, avec des tarifs élevés et un design, selon votre serviteur, bien trop teinté de la Série 3 précédemment citée. Une berline dynamique, certes, mais manquant de latinité… ce que son frère SUV Stelvio a en grande partie corrigé.
Et notre Tonale, alors ?

Tonale : Un sacré look !

Petit frère de ce Stelvio, le Tonale n’en est pas une copie en réduction. Et pour cause, il est basé sur la plateforme du cousin Jeep Compass, de la galaxie Stellantis. Avec un peu de chance, il aurait pu bénéficier de celle, plus moderne, d’un Peugeot 3008, mais les dés étaient déjà lancés. Aussi, nos amis italiens ont bien compris la leçon Giulia : ce Tonale a du chien, il est galbé et a de la présence dans ses optiques ! Mais… sa garde au sol assez importante, et ses porte-à-faux, qui pourraient être plus mesurés, ne peuvent cacher la plateforme dédiée à un usage aventurier et plus rustique de son cousin Jeep. Il y a donc du bon, avec des optiques modernes et à la signature lumineuse travaillée (bandeau LED à l’arrière à effet 3D), la fameuse calandre Scudetto et ses entrées d’air latérales pour former le Trilobo mythique. Dans les grandes lignes, il se veut être un SUV compact vraiment sexy, que l’on remarque dans la rue, sans peiner à cacher quelques lourdeurs dans les volumes de carrosserie. Cela dit, les fameuses jantes « à trou-trous », ici en 20 pouces, autre signe emblématique d’Alfa, sont magnifiques, tout comme cette peinture Vert Montreal. Des éléments qui se marient bien à la double sortie d’échappement apparente de cette version Plug-in Hybrid Q4 : le Tonale apporte malgré tout un design affirmé refusant l’hyper agressivité « SUVesque » qui devient parfois exagérée… et rend ses concurrents de plus en plus impersonnels. Forza Alfa !

Tonale : Un intérieur de qualité

À bord, il y a forcément davantage de latitude pour que s’exprime librement la créativité des experts du design intérieur Alfa. Si la position de conduite assez haut perchée ne fait pas de doute quant à l’origine de la plateforme, la sportivité, valeur clé de la marque au Biscione, est bien là. Double casquette iconique pour abriter la nouvelle instrumentation numérique, beau volant 3 branches, on est surtout surpris par la proximité de toutes les commandes quand on est au volant. Les commandes de climatisation sont physiques et à portée de main, le levier de la boîte automatique est légèrement surélevé, l’écran tactile central est lui aussi directement accessible, tout comme la commande de changement des modes de conduite. Globalement, l’ergonomie est bonne ! L’écran est moderne et plutôt bien rangé, avec des menus qui peuvent rappeler ceux de Porsche (et donc un peu austères, mais bien rangés… oui). Notons que l’instrumentation des compteurs est paramétrable, faisant préférer la cartographie des compteurs singeant les Alfa d’antan ou celle des plus modernes et sportifs façon 159 des années 2010. Qualité du graphisme, évocation du passé, c’est un sans-faute !

Idem, impossible de ne pas noter les très grandes et ergonomiques palettes au volant, qui sont toujours parfaites à utiliser en dynamique. De quoi faire frémir l’amateur d’autos sportives. Le soin du détail a aussi été porté sur l’habillage de la planche de bord en Alcantara ou façon cuir, qui réchauffe la qualité perçue, tout comme les inserts intégrant un motif d’éclairage d’ambiance sophistiqué. On regrettera quelques éléments à la finition plus perfectible, notamment autour du levier de vitesse ou encore l’ambiance, certes, assez intimiste et sportive mais bien sombre ! D’ailleurs pour nos versions haut de gamme, ce sera Alcantara noir avec surpiqûres rouge un rien criard ou cuir noir. Noir, c’est noir…

Côté aspects pratiques, rien à redire. Bon espace à l’arrière, si ce n’est une garde au toit peut-être un peu limitée pour les grands : à l’heure des SUV coupés et des compromis de design, cela devient fréquent. Cette version hybride rechargeable perd 115 l de volume de chargement pour un total de 385 l, à mettre en face des 490 l du nouveau BMW X1 30e équivalent. Moyen, donc.

Tonale Q4 : cuore sportivo ?

En ressortant de la conférence de presse, il est temps d’aller découvrir ces évolutions Tonale ! Rarement votre serviteur a vu autant d’enthousiasme dans une équipe, à atteindre le stade de l’autopersuasion en face d’une concurrence très féroce ! L’esprit latin et conquérant d’Alfa Romeo est bien toujours là. À Jean-Philippe Imparato, charismatique directeur général de la marque, ex-Peugeot, de conclure avec entrain que le carnet de commandes affiche un score x 10 entre 2021 et 2022 (2021, certes, très entachée par le Covid notamment… et avec seulement les chers Stelvio et Giulia au sein de la gamme !) ; que l’année 2021 a permis de revoir la batterie, le réservoir et manifestement la puissance (versus le Compass) de la version PHEV quand le reste de la gamme a vu la boîte mécanique supprimée (moteur diesel) et quelques améliorations design. M. Imparato confirme également une réduction de 40 % des émissions de CO2 entre 2022 et 2023 au niveau de la gamme.

En prenant le volant, on perçoit une direction moins surrassistée que celle de la version mild hybrid. Une bonne chose. Démarrage en tout électrique, énergie annoncée par Alfa pour durer encore 69 km en cycle mixte et 82 km en urbain (batterie nickel-manganèse-cobalt de 15,5 kWh ; autonomie totale annoncée de plus de 600 km). Valeurs possiblement optimistes ! Notons que le chargeur embarqué permet une recharge en 2 h 30 en charge rapide 7,4 kW ; 5 h 30 en 3 kW.

L’auto semble plus confortable que sa petite sœur. En milieu urbain et périurbain, l’agrément est bien là. En ville, le curseur orienté confort se manifeste par un quasi-pompage des amortisseurs au passage des dos-d’âne. Nous aurons obtenu une autonomie tout électrique de 46 km en mixte avant le démarrage du moteur thermique, valeur moyenne et plus alignée sur les performances des concurrents. Bonne surprise sur le ressenti du freinage, plutôt sous-assisté mais ayant un bon naturel, ce qui n’est pas toujours le cas sur les autos électrifiées, en cumulant freinage régénératif et mécanique !

Le Tonale est donc un bon compagnon moderne du quotidien : régulateur de vitesse adaptatif, centrage dans la voie actif, roulage en électrique, confortable, rien ne lui manque. Mais est-ce alors toujours une Alfa ? Tiens, les petites routes arrivent…

Tonale Hybride : Il est temps de passer en Dynamic !

Et sur ces petites routes avec un peu de relief, le moteur thermique dérivé du 1,3 Firefly des Fiat et Jeep gronde un peu… À l’image de beaucoup d’hybrides rechargeables, on perçoit bien que le thermique travaille plus que de rigueur pour également recharger la batterie comme il peut. Aussi, le moteur reste quelque peu à mi-régime, et est un peu rugueux. Le réveil moteur-boîte « à l’ancienne » se fait alors bien remarquer. D’ailleurs, Alfa nous annonçait une fonction « eCoasting Descent Control » pour ne rouler qu’à l’électrique en descente et bénéficier d’une vitesse régulée à 50 km/h, ajustable via accélérateur ou freins. Dommage que cette fonction ne fonctionne plus batterie « vide », quand le besoin d’énergie pour faire avancer l’auto est alors négligeable…

Nous parlions du bon ressenti du freinage : en Dynamic, il est annoncé qu’il bénéficie d’une course de pédale réduite de 15 % (freinage by-wire) pour plus de dynamisme. C’est plutôt probant en ressenti.

Quand on presse le mouvement, la puissance ne se fait pas attendre : si le moteur 1,5 mild hybrid, même en 160 chevaux, se montrait très effacé, ici, le surplus d’énergie est notable. L’électronique bride d’ailleurs moins les sorties de virage (ce qui était trop le cas, même antipatinage déconnecté), avec une motricité du train avant pouvant alors être prise en défaut… malgré l’aide théorique du moteur arrière électrique de 122 chevaux.

Alfa annonce 8 % de moins de roulis et autant de mieux en accélération latérale que ses concurrents, pour satisfaire à son image sportive. Sur petite route, l’auto présente un bon agrément, et la boîte automatique 6 rapports est un peu plus réactive au rétrogradage que sa sœur à double embrayage des versions mild hybrid. Seulement, avec 1 835 kg sur la balance, ce n’est pas une ballerine… Et si l’auto est agréable à rouler à rythme dynamique, elle sera encore très loin d’avoir la sportivité bluffante du grand frère Stelvio et son architecture de nature propulsion. Les performances restent aussi un peu à géométrie variable en fonction de l’état de charge de la batterie, quand les palettes au volant toujours aussi agréables à utiliser et la sympathique sonorité rauque et naturelle (alléluia !) de l’échappement rappellent un peu le cousin Abarth et séduiront les amateurs de conduite dynamique. La sonorité à bord reste en revanche plutôt terne. Sur le parcours mixte, avec tant et plus d’allers-retours sur une route sinueuse, nous culminons à 10,9 l/100 km de consommation batterie vide et 6,9 de consommation cumulée. Des valeurs dans la moyenne de ses concurrents.

Cerise sur le gâteau, nous avons eu la chance de réaliser quelques tours sur la piste Alfa Romeo du centre d’essai de Balocco. Si les performances restent satisfaisantes, elles semblent bien s’émousser au-dessus de 120 km/h, batterie « vide » et surpoids n’aidant pas… Néanmoins, l’auto confirme de bonnes capacités dynamiques, avec une direction encore un peu légère, même en Dynamic, mais plutôt informative. Le roulis est correctement maîtrisé ; l’auto continue cependant d’avoir un peu de souplesse en longitudinal qui la fait plonger au freinage : le train arrière est alors bien léger ! Avec le poids de la batterie sur l’arrière, l’auto est tout de même plus stable ici. Dans les virages serrés, le train avant s’affole bien, mais le moteur électrique arrière aide légèrement à enrouler. Élément amusant, les feux de détresse, historiquement sensibles aux freinages forts sur les produits italiens contemporains, s’allument également à l’action de l’antipatinage, qui reste toujours en partie connecté.