Essai Alfa Romeo : Junior Elettrica ou Junior Veloce ? L’électrique à fond les ballons

Au-devant de la Junior Elettrica

Dès mon arrivée en gare de Nice, je l’aperçois garée le long du trottoir : la Junior Elettrica exhibe une calandre triangulaire, héritée des standards Alfa Romeo. Malgré ses proportions compactes, la silhouette suggère un SUV urbain haut sur pattes, comme une cousine technique de la Peugeot 2008. Le tarif d’entrée annoncé oscille autour de 35 000 €, selon les finitions et éventuelles primes à l’achat.
Sous la robe, on trouve un moteur électrique de 156 ch, soutenu par une batterie proche des 50 kWh. L’autonomie théorique atteint jusqu’à 400 km sur cycle WLTP, bien que la réalité puisse varier selon votre façon d’effleurer (ou de martyriser) la pédale de droite. De prime abord, on n’a pas affaire à un dragster, mais ce petit bloc sait se montrer vif en milieu urbain. Il faut dire que le couple instantané de l’électrique a de quoi mettre un petit sourire sous la moustache (ou le masque, c’est selon).

J’ouvre la portière et découvre un intérieur à la fois simple et volontaire. Les plastiques de la planche de bord ne respirent pas le grand luxe, mais on sent une volonté de maintenir une certaine cohérence. L’écran tactile central d’une dizaine de pouces propose un système d’info-divertissement complet, la compatibilité CarPlay et Android Auto sans fil, ainsi qu’un GPS qui ne cherche pas à nous perdre dans un labyrinthe d’options. Les graphismes, colorés, émergent dans un univers emprunté à la banque d’organes Stellantis, avec quelques touches maison : logo Alfa au démarrage, menus épurés.
Je parcours l’habitacle du regard : la console centrale s’équipe de zones de rangements, le volume de coffre se situe autour de 350 litres, de quoi faire ses courses ou charger deux valises moyennes. Les sièges habillés de tissu et similicuir dévoilent un maintien correct. L’espace à l’arrière ne fait pas de miracle pour des passagers dépassant le mètre quatre-vingt, mais on reste dans les standards du segment.

Le contact mis (ou plus exactement le bouton pressé), la Junior Elettrica s’ébroue en silence. Je m’extirpe du centre-ville niçois et tombe sur de menues ruelles, où l’agilité de ce petit SUV surprend : rayon de braquage compact, direction légère, idéal pour slalomer entre scooters et piétons flânant le long des terrasses. L’accélération est franche, quoique linéaire. Je salue l’absence de bruit mécanique, remplacée par un léger sifflement. En mode « Eco », la réponse de la pédale est édulcorée, ce qui prolonge l’autonomie.
Sur la D6007, direction Cannes, je teste le mode « Normal » : l’auto retrouve de la vigueur, et les dépassements se gèrent sans angoisse. Les suspensions privilégient un confort relatif, permettant d’avaler les irrégularités de l’asphalte provençal sans vous faire sursauter. L’insonorisation, correcte, masque raisonnablement les bruits de roulement jusqu’à 110-120 km/h.

Au fil de la balade, la consommation s’établit autour de 17 kWh/100 km, parfois 18 kWh/100 km si vous jouez trop du pied droit. Sur autoroute, la jauge peut fondre plus vite, limitant le rayon d’action à environ 300 km. Le véhicule accepte une charge rapide à 100 kW, pour passer de 20 à 80 % en une grosse demi-heure. Une carte de recharge compatible Ionity ou d’autres réseaux publics sera la bienvenue, notamment durant un arrêt café face au bleu azur de la mer.
L’expérience de conduite urbaine se veut alors sereine. On profite d’un accès ZFE facilité, on évite les passages à la pompe, et l’on conserve une identité latine, ce qui n’est pas toujours le cas des propositions standardisées. Reste à savoir si ce SUV électrique comble la soif de passion du conducteur, ou si une version plus tonique peut répondre à cet appel…

La Junior Veloce au Paul Ricard

Après une nuit passée à goûter l’ambiance nocturne de Cannes, je me lance dans une autre étape de cette épopée méditerranéenne : direction Le Castellet, où m’attend la Junior Veloce. Pourtant 100 % électrique elle aussi, cette variante s’illustre par une puissance portée à 280 ch, accompagnée d’un couple musclé et d’un différentiel Torsen D sur le train avant. Un programme alléchant pour qui rêve de sensations. Ici, le prix de départ avoisine les 42 000 €, voire plus si vous ajoutez quelques options dédiées à la tenue de route et à l’habitacle sportif.
En arrivant devant l’entrée du Paul Ricard, je remarque la Veloce : même gabarit que la Elettrica, mais un faciès plus incisif. On devine des jantes 19 pouces bicolores, un bouclier percé d’ouïes optimisant le refroidissement et un nouveau dessin des feux diurnes. L’aérodynamique a reçu des attentions particulières. Quelques touches de noir laqué sur la carrosserie font comprendre qu’on ne plaisante plus.

Je m’installe : les sièges sport affichent une garniture mi-cuir, mi-Alcantara, offrant un maintien latéral plus sérieux. Le volant aplati en bas, orné de surpiqûres, et les palettes derrière la jante (dédiées au contrôle de la régénération ou du mode de conduite) indiquent clairement la volonté d’engager ce SUV dans un registre dynamique. La planche de bord reçoit quelques éléments en aluminium brossé, tandis que les seuils de portes arborent l’inscription « Veloce ». L’ambiance est dense, sans virer au luxe ostentatoire.

Une fois descendu dans la voie des stands, je passe en mode Sport. Exit le calme : le couple (annoncé autour des 400 Nm) réagit instantanément. Le circuit Paul Ricard, réputé pour ses longues courbes et sa ligne droite du Mistral, s’offre alors à moi. Pied droit enfoncé, la Veloce bondit vers des vitesses qu’on imagine rarement atteindre dans un SUV compact. Le silence de l’électrique rend l’expérience étrange : vous filez à vive allure, sans l’orchestre d’un moteur thermique. Les bruits d’air et de pneus deviennent le nouveau concerto.
Le différentiel Torsen D agit en coulisse pour canaliser cette énergie sur le train avant. En sortie de virage serré, le sous-virage demeure modéré, et on parvient à ressortir efficacement si l’on dose la puissance. La direction affiche une consistance supérieure à la Junior Elettrica standard, tout en préservant un certain ressenti de la piste. Le châssis, légèrement raffermi, autorise des appuis stables dans les courbes rapides. Je frôle la corde dans le double droit du Beausset, fasciné par l’équilibre général.

La Junior Veloce ne pèse pas plus qu’un pachyderme compact habituel, puisqu’Alfa Romeo a soigné la répartition des masses et retenu une batterie d’une capacité similaire à celle de la version Elettrica « de base » (même si elle peut légèrement différer pour soutenir la puissance). On se retrouve donc avec un 0 à 100 km/h réalisé sous la barre des 7 secondes, parfait pour un SUV électrique. Le freinage, confié à des disques ventilés à l’avant et à l’arrière, reste mordant tant que vous ne multipliez pas les tours à rythme infernal.
Au terme de quelques sessions sur le circuit, je constate que la Veloce sait préserver sa batterie à condition de ménager sa fougue. Avec l’attaque franche, l’autonomie s’évapore rapidement, ce qui impose une recharge sur l’infrastructure du Paul Ricard si l’on veut prolonger l’excitation. Néanmoins, cette voiture se veut avant tout un engin de route capable de sortir les griffes ponctuellement, pas un outil 100 % piste.