Il y a déjà quelques semaines de cela, les gens de la marque aux anneaux m’avaient convié à l’essai de cette nouveauté dans les environs de Marseille. Des ingénieurs allemands avaient spécialement fait le déplacement pour nous convaincre des avancées technologiques de leur best-seller. Après une heure et demie d’explications – en anglais dans le texte – ils avaient conclu en annonçant que cette nouvelle A4 était la première voiture « semi-autonome » de son segment. Sauf que, même si le petit parcours en rase campagne, dynamique et enchaînant les virages sur plus d’une quinzaine de kilomètres, mettait bien en évidence l’excellente tenue de route, il ne laissait malheureusement aucune place aux systèmes d’assistance à la conduite capables, en théorie, de piloter la voiture sans les mains.
L’opus 2016 de l’Audi A4 est fait pour avaler des kilomètres sur une belle bande d’asphalte noire et lisse. Après discussion avec les responsables de la presse, me voici en possession d’une A4 Avant V6 TDI 272, équipée de tout l’attirail technologique, en direction de l’Est et de ses Autobahns. Mon périple de plus de 1 600 km se fera sur une seule journée. Mon départ se fera de la place du Châtelet, au centre de Paris, pour rejoindre le chantier naval de Gdansk en Pologne.
Dring… Dring…
Il est cinq heures du matin lorsque mon téléphone, flanqué de la pomme, se met à sonner. Après un passage sous une douche froide pour bien me réveiller et un café bien noir pour ma dose d’excitant, me voici dans les rues désertes de Paris. En fait, les rues ne sont pas entièrement vides, puisqu’il reste ici et là des énergumènes bien amochés de la nuit passée.
J’arrive enfin à Châtelet. Mon carrosse illumine la place de ses beaux phares Matrix LED. La blancheur éclatante de cette lumière s’harmonise parfaitement avec la robe argentée du break. On me donne la clé, qui n’est autre qu’un boîtier de commande puisque l’auto fonctionne grâce au key less. J’entre dans l’habitacle et je suis accueilli par de superbes sièges en cuir fauve au dessin magnifique. Je m’installe facilement à bord, appuie sur la pédale des freins et enfonce le bouton start. Avant que le V6 ne démarre son show, le tableau de bord et ses deux écrans se réveillent avec une cinématique bien chiadée. J’entre dans le GPS la destination finale et me voilà parti pour presque 15 heures de route non-stop.
Les huit kilomètres qui me séparent de l’autouroute A1 ne sont qu’une formalité. La nuit est bien noire. Passé le péage, le premier coup de fatigue se fait déjà sentir. L’occasion est idéale pour activer les assistances à la conduite. J’enclenche tout d’abord le régulateur de vitesse qui se cache sous le commodo de gauche. Avec sa caméra avant et ses radars, il gère la distance avec la voiture qui se trouve juste devant moi. Simple et efficace. Calé à 130 km/h, l’ordinateur de bord annonce un petit 6,7 litres de gazole aux 100 km. Les minutes puis les heures passent. Les deux frontières qui me séparent de l’Allemagne sont franchies sans anicroche.
J’ai enfin atteint mon Graal : l’Autobahn.
La cavalerie de 272 chevaux de mon V6 TDI va maintenant pouvoir parler. Adieu la frustration des 130, place aux portions à la vitesse libre ! Du moins en théorie, car après une vingtaine de kilomètres sous pavillon 120 km/h, me voici dans les fameux bouchons teutons. Le GPS, très efficace, recevant l’information routière, m’indique qu’il faudra être patient pendant 45 minutes. L’horreur !
Midi. Mon estomac crie famine. Une seule solution : activer toutes les aides à la conduite et essayer le Traffic jam assistant capable de piloter l’auto dans un embouteillage. Si j’étais frileux jusqu’à présent avec l’Active line assist – système qui permet de garder la voiture entre les bandes blanches – ce bouchon monstre est l’occasion rêvée pour en faire l’essai. J’enclenche les aides. Le petit logo du régulateur de vitesse change. Mon A4 se cale sur le véhicule de devant, allant jusqu’à l’arrêt. Puis elle redémarre lorsque le « petit train » repart. Une courbe, le volant tourne tout seul pour prendre le virage bien au centre des bandes blanches. L’Audi n’a plus besoin de moi puisqu’elle tourne, avance et stoppe toute seule. Je suis bluffé ! Quand tout d’un coup, un bip résonne dans le cockpit. C’est le système qui demande de reprendre le volant. J’apprendrais plus tard que c’est la législation qui oblige le constructeur à opérer de cette façon, pour être certain que le pilote soit toujours au contrôle du véhicule. Mon ventre me rappelle à l’ordre et comme la voiture se conduit toute seule, je plonge dans mon sac thermos pour récupérer mon plat de penne fait la veille. Fourchette en main, me voilà dans les bouchons, en train de me rassasier. Mes voisins d’embouteillage n’en reviennent pas. Mais c’est pourtant la réalité. Mon A4 a conduit seule dans les bouchons.
Passé les grandes villes de l’Ouest, le trafic se fait moins dense et les portions libres plus longues. Mon puissant V6 fait des merveilles. Avec une vitesse de croisière à 200 km/h, je calme tout ce qui roule. J’ai même profité d’une portion libre de 8 km pour atteindre les 262 km/h (le bridage à 250 n’est pas très efficace). Par contre, la consommation monte de deux crans avec une moyenne, sur ces portions, à plus de 11 litres.
La frontière polonaise et les limitations de vitesse à 140 km/h se profilent devant moi. Maintenant en confiance avec les assistances, je laisse faire la voiture. Le volant bouge, prend de l’angle et passe les virages les uns après les autres. Dérouté au début, je cède désormais au plaisir de laisser l’auto se conduire – presque – toute seule. Il est 20 h 30, lorsque je vois enfin brandir le drapeau à damier.
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